
Cela fait longtemps que je voulais vous parler d’une œuvre qui m’a profondément marqué : Wicked. Entre musique, émotions et réflexion sur la différence, voici pourquoi cette comédie musicale a trouvé une place particulière dans mon cœur.
Vous connaissez mon amour pour la musique et les mondes imaginaires ; c’est donc sans nul doute que je suis tombé amoureux de Wicked. Comédie musicale créée le 30 octobre 2003, inspirée du roman de Gregory Maguire Wicked : La Véritable Histoire de la méchante sorcière de l’Ouest publié en 1996, elle a fait l’objet d’un film sorti en 2024, avec en tête d’affiche Cynthia Erivo dans le rôle d’Elphaba et Ariana Grande dans celui de Glinda.
Wicked trouve ses origines dans le pays d’Oz, avant l’histoire que nous connaissons tous : celle de Dorothy Gale dans Le Magicien d’Oz. En effet, la comédie musicale nous raconte la rencontre entre Elphaba et Glinda, et comment celles-ci vont devenir respectivement la méchante sorcière de l’Ouest et la gentille sorcière du Sud. En 2024, Jon M. Chu nous propose au cinéma son adaptation, dans un premier film qui met en scène l’acte I.
Synopsis
Notre histoire se déroule à l’université de Shiz. Glinda, toute de rose vêtue, rencontre Elphaba, une femme à la peau verte qui semble détenir des pouvoirs magiques mystérieux et puissants. Si, au départ, leur relation paraît tendue, celle-ci s’adoucit et se transforme en une belle amitié tout au long du film.
Wicked : un fil haut en couleur et en dualité
Avant de vous parler de mon analyse de l’histoire, je voulais d’abord revenir sur la scénographie et les chansons. Wicked, c’est un film ultra coloré !
On retrouve bien sûr la dualité du rose et du vert — symboles de Glinda et d’Elphaba — mais le film déborde surtout de couleurs vives qui lui donnent une énergie incroyable.
Elphaba et Glinda tiennent les rôles principaux, mais ils sont magnifiquement accompagnés par des personnages secondaires qui ont chacun leur propre palette de couleurs. Même la Cité d’Émeraude, avec sa teinte dominante, paraît encore plus contrastée et vivante : on a vraiment envie d’y aller !
Tout ça crée un spectacle visuel fabuleux, plein de dynamisme, de magie et d’émotion.
Et puis, bien sûr, il y a les chansons.
Oui, Wicked est une comédie musicale — donc pour ceux qui n’aiment pas ça, pas de surprise, on est bien dans le style Broadway ! Mais pour moi, c’est justement ce qui fait son charme.
Cynthia Erivo, qui incarne Elphaba, porte littéralement le film. Sa voix est puissante, vibrante, pleine d’émotion. Elle nous touche profondément et rend le personnage encore plus humain.
Et puis il y a Ariana Grande. On a l’habitude de la voir dans un tout autre registre, mais ici elle est drôle, lumineuse, surprenante, et elle monte des notes… vraiment très hautes ! Elle apporte une légèreté bienvenue et incarne à merveille cette Glinda un peu loufoque mais pleine de cœur.
Wicked, une oeuvre politique
Si j’ai choisi de vous raconter cette histoire, c’est parce que le personnage d’Elphaba m’inspire profondément et me rappelle souvent ce que peuvent ressentir les personnes hautement sensibles. Mais avant cela, j’aimerais vous parler un peu de l’œuvre originale.
Même si Wicked semble se dérouler dans un monde totalement imaginaire, certains aspects sont lourdement inspirés de notre société moderne. Bien que la trame principale se concentre sur l’amitié entre les deux protagonistes, des enjeux politiques beaucoup plus vastes s’y jouent.
En effet, les animaux y occupent une place importante. Nous apprenons qu’ils sont enlevés et/ou destitués de leurs fonctions depuis un événement tragique : une grande famine. Ils perdent par ailleurs peu à peu la parole, comme si l’on cherchait à les réduire au silence. Vers la fin du film, nous découvrons que cette directive vient du Magicien d’Oz. Il n’a pas de grief particulier contre eux, mais, pour unir les humains à sa cause, “il leur faut un ennemi commun” : les animaux.
Rappelons également que le Magicien d’Oz n’a pas de véritables pouvoirs, que c’est un imposteur, et que cet ennemi sert surtout à détourner l’attention de lui-même. Je suppose que, dans le livre, cet aspect est davantage développé, mais sous les traits du magicien se cache finalement un dictateur assoiffé de pouvoir, dissimulé derrière une façade de bienveillance. D’ailleurs, il se montre rarement directement : il agit depuis son grand robot et masque ainsi sa véritable apparence.
Finalement, c’est un homme manipulateur, avide de pouvoir, ce qui n’est pas sans rappeler certaines dérives de notre époque. Cette façon qu’ont certains dirigeants d’instaurer des conflits et de chercher des boucs émissaires plutôt que de remettre en question leur propre ego.
On observe une véritable discrimination envers les animaux. Par ailleurs, Madame Morrible (une sorte de conseillère) joue également un rôle clé dans cette oppression. Dans l’une des scènes, elle oblige les singes à se liguer contre Elphaba s’ils veulent revoir leur famille. C’est cette injustice qui pousse Elphaba à prendre son envol et à refuser la proposition du magicien de devenir sa conseillère — devenant ainsi l’ennemie du gouvernement d’Oz.
Elphaba, symbole de différence et de résilience
Justement, c’est le personnage d’Elphaba qui va nous intéresser. Celle-ci est singulière dès sa naissance de par sa couleur de peau, verte, mais aussi par les pouvoirs qu’elle possède. Dans tout le pays d’Oz, personne ne partage sa couleur, et cela lui vaudra moqueries, harcèlement dès son plus jeune âge et désamour de son père.
Glinda soulignera d’ailleurs sa différence et l’invitera à venir la consulter pour “régler son problème”, dans un geste de fausse bienveillance. Pendant une grande partie du film, Elphaba sera rejetée par la société et rejettera elle-même son apparence.
Dans la chanson The Wizard and I, elle exprime son souhait de rencontrer le Magicien d’Oz afin qu’il lui accorde un vœu : celui de changer la couleur de sa peau. Cette souffrance, nous la ressentons particulièrement lors de la scène du bal. Dès son entrée, elle est pointée du doigt. Vêtue entièrement de noir, avec un chapeau offert par Glinda (cadeau à la fois ironique et cruel), elle effectue une danse symbolique, exprimant sa douleur et le harcèlement qu’elle subit.
Ce n’est qu’à partir du moment où Glinda reconnaît son erreur et la considère comme une véritable amie qu’Elphaba est enfin acceptée par le reste de l’école. Elle ira même jusqu’à refouler ses sentiments pour le prince Fiyero, qui semble s’intéresser à elle, tant elle est convaincue qu’elle “n’est pas celle qu’il faut” (I’m Not That Girl).
Cette singularité qu’elle rejette au début du film, elle finira par l’accepter pleinement, prenant le contrôle de ses pouvoirs. Dans la chanson finale Defying Gravity, elle s’élève littéralement et symboliquement en s’acceptant enfin telle qu’elle est.
Un message universel
Si j’aime tant le personnage d’Elphaba, c’est parce qu’elle me rappelle toutes ces personnes brimées par la société. Celles qui sortent du moule sont souvent moquées, mises à l’écart, voire effacées. Cette différence, d’abord source de souffrance, devient pourtant une force lorsque nous décidons de l’embrasser pleinement. En tant que personne hautement sensible, je me reconnais dans la façon dont Elphaba ressent tout plus fort : la douleur, l’injustice, la beauté aussi. Comme elle, nous avons parfois l’impression d’être ‘trop’ pour ce monde, alors qu’en réalité, c’est notre intensité qui fait notre magie.
Alors oui, peut-être que, pour la société, nous sommes nombreux à être des Wicked Witches — des “méchantes sorcières”. Mais il ne tient qu’à nous de nous élever et de devenir les personnes que nous voulons être.
En attendant que nous défions tous les airs, j’ai hâte de découvrir le deuxième volet de Wicked, prévu pour le 19 novembre.