« A fleur de peau », « Trop sensible »… La plupart des articles sur la haute sensibilité débutent de cette manière. Soyons honnêtes, vous en trouverez la définition un peu partout sur internet… Chacun y ajoute un peu de ce qu’il veut et son interprétation. Ici, nous avons répertorié de manière simple les recherches scientifiques menées pour que vous ayez un aperçu global de ce qu’est la haute sensibilité, de ses origines à sa définition. Bonne lecture !
Les origines
Les études sur la haute sensibilité remontent au IIIè siècle après Jésus Christ, avec un philosophe qui commence à évoquer la sensibilité et des personnes qui sont vite fatigables, qui n’aiment pas la vulgarité… Déjà à cette période était mis en évidence un certain type de tempérament.
C’est véritablement au XXème siècle qu’un psychiatre allemand met le mot anglais « sensitive » sur ce type de tempérament. Carl Jung continue de développer ces recherches sur la sensibilité, et Elaine Aron (psychothérapeute, chercheuse en psychologie, autrice) qui a étudié les recherches de Jung, sort le premier ouvrage sur la Haute Sensibilité (HS) en 1996, qui permet alors véritablement de faire connaitre ce qu’est la Haute Sensibilité. Si Elaine Aron n’a pas découvert un nouveau trait de personnalité, elle lui donne un nom précis, majoritairement repris aujourd’hui. Le terme anglais « highly sensitive » a ainsi été traduit en français par « hypersensible », ce qui semble être une erreur de traduction puisqu’il s’agit en fait de « sensibilité élevée » ou de « haute sensibilité ».
Depuis les 25 dernières années, les recherches sont de plus en plus nombreuses et le sujet se fait davantage connaitre en France, notamment grâce à l’impulsion de Saverio Tomasella (Docteur en psychologie, psychanalyste et écrivain), HS lui-même, qui a publié plusieurs ouvrages sur le sujet (Hypersensibles, trop sensibles pour être heureux?, Eyrolles, 2013; A fleur de peau, Leduc, 2017) destiné aux adultes comme aux enfants, et qui a créé l’Observatoire de la sensibilité.
Quelle est la définition? Comment savoir?
La Haute Sensibilité est une sensibilité plus élevée que la moyenne (un HS ressentirait à hauteur de 40% supplémentaire une émotion). 20 à 30% de la population serait HS (hommes et femmes confondu.e.s). Elaine Aron parle d’une personne sur quatre, je vous laisse imaginer.
Il y autant d’hypersensibles qu’il y a d’hypersensibilités. Ainsi, la Haute Sensibilité diffère selon les personnes car nous sommes tous uniques. Cependant, les chercheurs et notamment Elaine Aron, ont mis en évidence des caractéristiques qui reviennent le plus souvent chez les HS et qui permettent de nous en donner une définition. Elaine Aron appelle ça le « DOES » :
- Depth of processing : soit la profondeur du traitement
- Over aroused : le fait d’être facilement surstimulé
- Emotional reactivity and high empathy : le fait d’être à la fois réactif émotionnellement en général et de faire preuve d’une grande empathie
- Sensitivity to sublte stimuli : le fait d’être sensible aux stimuli subtils
Selon la psychothérapeute, ces quatre aspects sont tous présents chez une personne hautement sensible, et si un de ces éléments n’est pas constaté, il ne peut s’agir de haute sensibilité telle que nous l’entendons ici.
Voici une explication plus explicite de ces quatre traits:
Un traitement sensoriel en profondeur des informations : Les personnes hautement sensibles seraient donc des personnes particulièrement observatrices, elles prendraient le temps de traiter chaque information (qu’elle soit sensorielle, émotionnelle, intuitive, intellectuelle…) de manière approfondie. Les HS ont une tendance à beaucoup réfléchir et avoir des questions et réflexions profondes, à avoir du mal à prendre une décision en raison des trop nombreuses possibilités. Cela peut donner l’impression que la personne est lente, prudente… Mais en réalité cela est dû au fait d’un traitement des informations plus poussé que chez la plupart des gens qui ne sont pas hautement sensibles.
L’hyperstimulation (du goût, du toucher, de l’équilibre, des odeurs, de l’ouïe, 6è sens kinesthésique…) : Cela veut dire que les personnes hautement sensibles sont stimulées par tout un tas de facteurs extérieurs qui vont agir sur les pensées et même parfois sur le comportement. Nous percevons tout… A cela s’ajoute l’hyperstimulation émotionnelle. Les émotions sont vécues très intensément et cela peut bouleverser comme enchanter… Tout ce trop plein de stimulations abouti très souvent à une saturation (parfois plusieurs fois par jour, selon qui l’on voit, ce que nous faisons…) et demande parfois aussi un grand besoin de solitude pour revenir à soi, pour être au calme, sans stimulations extérieures. Elaine Aron résume cela très bien : « une personne qui est davantage consciente de ce qui passe à l’intérieur et à l’extérieur d’elle-même et qui traite ces informations de manière plus approfondie peut avoir tendance à s’épuiser mentalement et donc physiquement (le cerveau fait partie du corps) avant les autres. ». Ainsi, le fait d’être facilement surstimulé serait un effet naturel découlant de la profondeur de traitement.
La réactivité émotionnelle et l’empathie : La réactivité émotionnelle est elle aussi liée à la profondeur de traitement car ce sont nos émotions qui nous disent à quoi prêter attention, quoi apprendre ou quoi mémoriser si besoin. Elaine Aron insiste sur le fait que sans le guide que sont nos émotions, nous ne pourrions rien traité pour s’en souvenir. Si ceci n’est pas clair, un exemple tout bête : lorsque nous sommes dans un autre pays, nous apprenons plus facilement la langue du pays car nous l’entendons partout mais aussi car nous désirons pouvoir communiquer.
Les personnes hautement sensibles sont également très perméables aux énergies, aux émotions des autres, elles n’ont pas de filtre. On parle « d’hyper empathie » (car l’empathie est très intense et plus forte que la moyenne). Les HS vont ressentir l’ambiance d’un groupe, d’un lieu, de manière presque instantanée. Beaucoup de choses sont perceptibles, des choses qui sont invisibles ou presque pour les personnes qui ne sont pas hautement sensibles. Ainsi, si tout le monde est capable de comprendre les mots et de voir quelques indices sur comment quelqu’un se sent, mais une personne HS va dans une certaine mesure ressentir ce que l’autre personne ressent. Voilà pourquoi nous ne supportons pas les injustices et la cruauté.
La sensibilité liée à la subtilité : Les HS ont un fort sens de la nuance, ce qui donne beaucoup de place à l’implicite : perception des gestes, des intonations de voix lorsque quelqu’un parle, les mimiques faciales… Tout est analysé de manière inconsciente, chaque élément est observé, considéré… Conscience des sons, des odeurs, de tous les détails, les HS ont les sens en alerte. Cette subtilité des détails peut toutefois être mise à mal en cas de surstimulation : pression, stress, fatigue…
Plus récemment, depuis 2010-2013, une cinquième caractéristique a été découverte par le chercheur et psychologue Michael Pluess :
La susceptibilité différentielle : Il s’agit d’un terme scientifique, qui n’a rien à voir avec la susceptibilité telle qu’on la connait. Mickael Pluess a mis en évidence grâce à ses recherches une « sensibilité avantageuse », c’est à dire que la sensibilité constitue un avantage selon l’impact de l’environnement sur la personne. De manière simple, si une personne HS se trouve dans un environnement bienveillant, qu’elle est écoutée et valorisée, alors sa sensibilité sera un véritable atout à tout point de vue. En revanche, si une personne HS se trouve dans un mauvais environnement, entouré de mauvaises personnes, cette personne ira mal et sa sensibilité sera perçue comme un « défaut ». Ainsi, la sensibilité avantageuse serait amplifiée par ce qui est bien ou mal et serait très influencée par l’environnement. (D’où l’importance de bien s’entourer et d’avoir un espace à soi, mais cela fera l’objet d’un autre article !). Des études ont d’ailleurs montrées que l’expérience personnelle et l’enfance des HS avaient un impact sur leur façon de vivre leur haute sensibilité. Les personnes ayant eu une enfance heureuse arriveraient mieux à tirer profit de leur sensibilité élevée dans leur vie d’adulte et inversement.
J’espère que cet article vous aura aidé à y voir plus clair dans ce qu’est la Haute Sensibilité.
Si vous découvrez votre sensibilité élevée avec cet article, pas de panique !!! Bienvenue dans cette belle communauté de gens sensibles. Il n’existe aucun test scientifique suffisamment fiable qui vous permette d’être sur.e.s que vous êtes HS car la haute sensibilité se décline à l’infini. Seule votre intuition peut vous guider. Si vous voulez toutefois en savoir plus, vous pourrez trouver des tests conçus par Elaine Aron et Saverio Tomasella en cliquant ICI.
Si vous vous sentez désemparé face à ce trait de personnalité, je vous conseille d’en parler autour de vous, à vos proches, vos amis, votre famille et/ou à prendre rendez-vous avec un spécialiste (psychiatre, psychologue, psychothérapeute). Il n’y a pas de honte à avoir à aller voir des professionnels. Le but est que vous soyez accompagné.e.s convenablement sur le long chemin qu’est la découverte de la haute sensibilité. Ne vous isolez pas !
Vous pouvez aussi nous écrire, en commentaire ou par mail à deeplysensitive@gmail.com. Nous répondrons à vos questions sans jugement et en toute bienveillance. Nous aussi nous sommes de grands sensibles !
N.B. L’article sera complété au fur et à mesure de l’évolution de Deeply Sensitive.