Il n’y a pas si longtemps, j’observais un article sur linkedIn intitulé : « Comment rater un entretien d’embauche en 10 leçons ». Ma pensée en arborescence m’a conduit à cette question que les employeurs posent beaucoup en entretien : Citez-nous X qualités et X défauts ? Continuant ma réflexion, je me suis demandé quels défauts étaient proscrits d’évoquer, avec déjà quelques idées en tête concernant l’expression de ses émotions. Mon intuition a vu juste, l’émotivité est considérée dans la plupart des articles que j’ai retrouvés, comme un défaut. Mais, comme un bon « défaut » utile à évoquer lors d’un entretien.
L’idée de laisser ses émotions au bas de la porte quand nous rentrons en entreprise est-elle en train d’évoluer ? Certes l’intelligence émotionnelle est de plus en plus à l’étude dans le monde du travail, force est de constater tout de même qu’il y a encore énormément de progrès à faire. En effet, d’après les différents articles que j’ai trouvés, dont sur le site de l’Étudiant, il est préconisé de parler de son émotivité mais en tant que défaut et non qualité. Même s’il faut choisir des « défauts mais pas vraiment défaut», il n’en reste pas moins que le mot émotivité ici est péjoratif. Avant de continuer à réfléchir, je me suis intéressé à la définition du « émotif/émotive ». Voici les définitions du Larousse : « Relatif aux émotions, suscité par l’émotion ; Qui s’émeut, se trouble facilement ; impressionnable, nerveux, sensible : un enfant émotif ». En effet, aux premiers abords quand nous lisons la définition cela peut paraître plutôt négatif, notamment avec les mots “nerveux” et se “trouble facilement”. Mais pourquoi une personne émotive ressentirait uniquement des émotions désagréables ? Pourquoi n’avons-nous pas mis dans cette définition, « ressent des joies immenses, ressent et exprime ses émotions, haute capacité à ressentir » ? Finalement même la définition donne un aspect négatif à être émotif et donc, par conséquent vu comme un défaut pour un employeur. Mais si elle était tournée autrement, est-ce que l’émotivité serait vue comme une qualité. De mon point de vue, l’émotivité en entreprise est une très bonne chose. Elle apporte des rapports humains, montre que nous ne sommes pas des machines. Être émotif ne veut pas dire que nous pleurons h24, que nous perdons notre sang-froid sans arrêt, autant d’idées reçues dont sont souvent victimes les personnes hautement sensibles. Rappeler l’article de Séléné : Pourquoi les grands sensibles feraient de meilleurs leaders ? J’ai par ailleurs beaucoup de mal avec cette qualité/défaut. Pourquoi ? Parce que nous en avons tous. Je n’ai jamais osé retourner la question à l’employeur : « et vous ? » Chacun va donner un défaut qui va plutôt le mettre en valeur. Nous avons tous des défauts et des qualités. La question est plutôt qu’est-ce que nous voulons en faire ? Une personne émotive peut en effet être affectée facilement, mais elle peut aussi transmettre ses émotions à d’autres tel que la joie, un véritable vecteur de motivation pour le travail en équipe. Sauf que la résultante est tout autre. Preuve en est lors de la dernière journée mondiale de la sensibilité, organisée par l’observatoire de la sensibilité à Paris ce 13 janvier dernier et à laquelle j’ai pu assister.
Durant cette journée, des professionnels et visiteurs intéressés par la haute sensibilité ou eux-mêmes hautement sensibles, se sont réunis au théâtre de la Camilienne. Plusieurs ateliers, échanges, conférences ont eu lieu permettant ainsi à de nombreuses personnes de s’exprimer. J’ai pu ainsi entendre le point de vue et les travaux de tous les professionnels présents, mais surtout écouter les témoignages de nombreuses personnes hautement sensibles, notamment lors de la table ronde. Le résultat est plutôt évident : les profils atypiques ne sont pas encore très bien intégrés dans notre société, voire davantage dans le monde du travail. L’intelligence émotionnelle est une petite préoccupation pour les entreprises. Au travers diverses prises de paroles, j’ai pu constater que beaucoup de personnes étaient en souffrance, due à ce rejet de la société. Bien souvent, ils nous faisaient part de leurs problèmes de compréhension de leurs ressentis et leur haute sensibilité, mais aussi parce que quand ils le font, ils sont très vite harcelés, malmenés et j’en passe. C’est assez édifiant quand nous remarquons que les anciens modèles de management ont été bousculés notamment avec la crise sanitaire. Il est à noter tout de même que nous faisons des progrès et c’est d’ailleurs ce que semblaient évoquer Fanny Marais et les autres professionnelles de l’observatoire de la sensibilité, lors de cette table ronde. De mon côté, je pense qu’il y a encore du chemin à faire, notamment dans les organisations mais aussi sur les préjugés sur les grands sensibles. Pour ma part j’ai évolué, et je ne cache plus que je suis un grand émotif, n’étant même plus touché quand quelqu’un ne la comprend pas. Et si je repassais des entretiens, je n’hésiterais pas à parler de ma haute sensibilité comme une force et non comme un pseudo défaut. Je pense, qu’après avoir accepté votre sensibilité et essayer de ne plus la combattre, vous êtes plus enclin à en tirer tous les bénéfices, à vous protéger d’éventuelles agressions externes qui pourraient vous gêner et à être en pleine possession de vos moyens. Il y aura toujours des personnes qui vous critiqueront et qui verront en vous qu’un pleurnichard… C’est donc que cette personne ne fait pas d’efforts pour vous comprendre et ne voit pas le réel potentiel en vous. Car un vrai leader et un vrai manager, ne devraient pas choisir leurs équipes sur des rapports de force. Mais bel et bien sur les capacités de chacun. Les profils des personnes hautement sensibles ont plein de choses à offrir, et bien souvent les managers le savent. Soit ils optent pour une réelle compréhension, soit ils vous harcèlent parce qu’ils ont du pouvoir. J’ai espoir en l’avenir et je suis convaincu que les profils atypiques ont leur place en entreprise et peuvent s’intégrer sans problèmes dans des équipes. Ça va certainement demander du temps mais nous y parviendrons.
J’espère que cet article vous aura en tout cas donné du courage pour vos futurs entretiens voire si vous êtes en poste. Je vous conseille vivement le livre de Fanny Marais, Hypersensible, 10 séances de coaching pour vivre sa sensibilité au travail. Je termine de le lire et bientôt je vous ferai une chronique à ce sujet. Je vous conseille également de ne pas hésiter à contacter un professionnel si vraiment vous en sentez le besoin. Si aujourd’hui je crois que mon trait de caractère hautement sensible peut être un atout pour un employeur, je suis sûr que vous le pouvez aussi.